Situé à 22 km à l’est de Chinon et à 15 km au sud d’Azay-le-Rideau, Crissay-sur-Manse détient le label « Plus beau village de France ». La qualité de l’architecture du village et l’harmonie des paysages alentour ont justifié leur protection au titre des sites, par inscription en date du 8 février 1967 (loi du 2 mai 1930). L’inventaire du patrimoine conduit en 2006-2008 dans le cadre de l’inventaire topographique du canton de l’Ile-Bouchard a permis de dater par dendrochronologie plusieurs maisons, montrant ainsi que le village actuel doit pour une bonne part sa physionomie aux constructions érigées aux XVe et XVIe siècles.
Bâti sur le flanc d’un coteau calcaire dominant la Manse, le village de Crissay étage ses maisons de tuffeau aux toits d’ardoise sur une pente douce qui conduit le visiteur de l’église au château et à la grande place.
Situé à 22 km à l’est de Chinon et à 15 km au sud d’Azay-le-Rideau, Crissay-sur-Manse détient le label « Plus beau village de France ». La qualité de l’architecture du village et l’harmonie des paysages alentour ont justifié leur protection au titre des sites, par inscription en date du 8 février 1967 (loi du 2 mai 1930). L’inventaire du patrimoine conduit en 2006-2008 dans le cadre de l’inventaire topographique du canton de l’Ile-Bouchard a permis de dater par dendrochronologie plusieurs maisons, montrant ainsi que le village actuel doit pour une bonne part sa physionomie aux constructions érigées aux XVe et XVIe siècles.
Bâti sur le flanc d’un coteau calcaire dominant la Manse, le village de Crissay étage ses maisons de tuffeau aux toits d’ardoise sur une pente douce qui conduit le visiteur de l’église au château et à la grande place.
La présence d’une église et d’une paroisse (Crissiacum parochia ecclesiae Crissiaci) est mentionnée vers 1080 dans le cartulaire de l’abbaye de Noyers et le premier seigneur de Crissay est Bouchard de l’Ile, cité en 1084. A partir du XIIe siècle, la famille Turpin, originaire du Vendômois, entre en possession du fief de Crissé qu’elle conservera jusqu’en 1632. Leurs armes se lisent « losangé de gueules et d’argent ».
Entre 1490 et 1540, le village connait un essor sans précédent sous l’impulsion de Jacques 1er puis de Jacques II Turpin, essor architectural qui se manifeste également aux environs proches, tant à Avon-les-Roches où Lancelot de la Touche fait ériger la somptueuse collégiale des Roches-Tranchelion (1510-1527) qu’à L’Ile-Bouchard où Louis II de la Trémoille fait construire, dans l’île, un nouveau corps de logis agrémenté d’un jeu de paume (aujourd’hui disparus).
L’église Saint-Maurice de Crissay-sur-Manse (inscrite Monuments historiques en 1926) est édifiée sur les ruines d’une église romane à l’initiative des seigneurs de Crissé, Jacques Ier puis Jacques II Turpin. La nef est composée d’un vaisseau principal comprenant trois travées voûtées d’ogives agrandi d’un bas-côté nord de deux travées. Au sud, le clocher de plan carré, épaulé par des contreforts d’angle, porte une flèche en pierre, portant à l’intérieur une inscription indiquant sa date d’achèvement : « L’AN MIL CINQ CENT VINGT ET SEPT P. COLIN DURAND ET JEHAN OGER FUT LE PLOMB CLOCHIER PARFAICT. »
L’église abrite l’enfeu de Catherine du Bellay, cousine du poète Joachim du Bellay et épouse de Jacques II Turpin, née en 1500 et décédée en 1529. Cet enfeu était à l’origine entièrement peint. Il a conservé des traces de polychromie et l’on peut toujours y lire l’épitaphe de Catherine :
EN CE LIEU CY QUE VOUS VOYEZ REPOUSE DE JACQUES TURPIN LA TRÈS BONNE EPOUSE MADAME KATHERINE DU BELLAY A SON AME ESPOIR BON ET DELAY QUE LE SAULVEUR FERA GRASSE ET PARDON VOUS REQUERANT DE BON CUEUR ET PAR DON QUI ESPERE DE MORTS LES TRAICTZ PASSEZ PRIER POUR ELLE ET POUR TOUS TREPASSEZ ELLE PASSA LE PREMIER JOUR DE MAI QUI SUS LES AULTRES MOYS EST PLUS GAY MIL ET CINCQ CENS VINGT ET NEUF ET L’ANNEE VINGT ET NEUFYEME APRES QU’ELLE FUT NEE SEMBLABLEMENT SONT CY MIS AUPRES D’ELLE QUATRE BEAULX FILZ ET UNE FILLE BELLE |
La datation dendrochronologique de la charpente et de divers éléments du pan de bois montre que cette maison a été construite en 1494 ou très peu après. A l’origine, elle était entièrement en pan de bois et l’angle nord-est conserve un poteau cornier entier.
La partie inférieure du mur gouttereau nord et le pignon ouest ont été refaits en pierre de taille. En face, la maison à tour d’escalier hors-œuvre, dite Maison Gaby, date de 1523.
La maison du Grand Carroi construite dans la première moitié du XVIe siècle, est la plus imposante du vieux bourg. Bâtie en pierre de taille, sa partie gauche a été remaniée avec la création d’un étage intermédiaire entre le rez-de-chaussée et le premier étage, mais la partie droite a conservé sa disposition d’origine. Le parement en pierre de taille soigneusement appareillé est continu et l’examen de la charpente en chêne de type à chevrons-formant-fermes confirme l’unité de l’ensemble. Le changement d’orientation existe dès l’origine. L’analyse dendrochronologique de cette charpente a permis de la dater de 1536 (ou dans les deux ans qui suivent). L’escalier droit, et non plus en vis, placé à l’intérieur de l’édifice, et non plus dans une tour accolée, montre la conception moderne de cette maison dont le décor extérieur, très sobre, n’utilise que timidement des éléments Renaissance aux agrafes des baies.
Enfin, on ne saurait quitter le village sans en voir le château (propriété privée, la visite n’est pas libre). Il occupe un emplacement privilégié à la rupture de la pente du coteau qui domine la rive droite de la Manse. Il est constitué d’un vaste ensemble regroupant plusieurs bâtiments d’époques différentes, entourés de fossés artificiels d’où partent des galeries d’extraction de tuffeau. L’essentiel des vestiges conservés encore aujourd’hui sont contemporains ou postérieurs à 1350. Au milieu du XIVe siècle, le logis seigneurial se situait dans l’imposant et austère bâtiment qui ferme le site au nord, prolongé d’un corps de bâtiment en retour d’équerre à l’ouest, tous deux étant couverts en appentis.
En contrebas, un logis, inachevé, a connu plusieurs changements de parti. Les datations établies par dendrochronologie ont permis de repérer deux phases principales de construction. L’une commence vers 1408-1411 avec l’édification du logis proprement dit, épaulé d’un corps de bâtiment au sud-ouest (souvent appelé à tort « donjon »). La seconde phase est due à Jacques Ier Turpin, chambellan du roi, qui épousa en 1490 Louise de Blanchefort. La façade sur cour du logis est alors totalement reconstruite et l’on bâtit, vers 1507, une élégante galerie voûtée d’ogives reliant le logis au mur d’enceinte ouest. A l’intérieur, Jacques Turpin a fait reprendre la disposition de la grande salle, chauffée par une large cheminée surmontée d’une frise peinte et sculptée de tours.
Martine Lainé, chercheur au service Patrimoine et Inventaire de la Région Centre-Val de Loire
Pour en savoir plus :
– Dossiers d’inventaire de la commune